Anita Traoré : « Il est difficile de lutter contre le viol dans un pays où même les imams abusent des fillettes ».

Anita Traoré : « Il est difficile de lutter contre le viol dans un pays où même les imams abusent des fillettes ».

anita2Sur le continent africain, les femmes sont quotidiennement victimes de violences, qu’elles soient domestiques ou sexuelles. C’est un sujet qui demeure tabou en dépit des actions des organisations de protections des femmes et des institutions africaines. face à ce phénomène, Mme Anita Traoré présidente et fondatrice de l’Association Chance et Protection Pour Toutes nous a accordée un interview. lisez!!!

femmesafricaines.info : – Pouvez-vous nous parler de votre  association ?

Anita Traoré:   L’association Chance et Protection Pour Toutes (ACPPT) est une association créée il y a un peu plus de deux ans dans le but d’informer et de sensibiliser sur les violences faites aux femmes (mutilations génitales féminines, mariages forcés, violences sexuelles, violences conjugales, harcèlement de rue) etc. Nous prenons en charges des victimes afin de les accompagner aux mieux dans leurs démarches administratives, sanitaires, professionnelles et personnelles.
Nous collaborons principalement avec la cimade, le planning familial, la mission locale et le centre de formation d’apprentis de la ville de Tours où nous organisons régulièrement des campagnes de sensibilisation sur les violences faites aux femmes.
Nous sommes également en étroite collaboration avec plusieurs associations guinéennes luttant contre les mêmes causes que nous.

A Tours (France), nous avons plusieurs fois organisé des conférences-débats autour des violences faites aux femmes avec des intervenants comme le planning familial. En août 2015, un concert caritatif organisé à Tours avec des chanteurs guinéens nous a permis de récolter des fonds pour notre association. Nous espérons pouvoir organiser plusieurs événements de ce type lors desquels nous pouvons sensibiliser et informer le public.

Grâce à la pétition « brisons le tabou, parlons-en à l’école, » initiée par Binta Diallo,  à laquelle nous nous sommes associés, nous avons été reçu au ministère de l’éducation nationale, avec lequel nous allons prochainement signer une convention qui nous permettra de faire des interventions au sein des établissements scolaires dans le cadre de nos prochaines campagnes de sensibilisation.

Bien que nous arrivions à sensibiliser et à informer via notre page facebook, https://www.facebook.com/associationchanceetprotectionpourtoutes/?ref=ts&fref=ts&qsefr=1
nous envisageons de créer un site internet pour informer et sensibiliser un public plus large.

vous évoluez dans plusieurs domaines de la vie, quels sont ces domaines ?

Je suis agent polyvalente au centre de formation d’apprentis de la ville de Tours (France). Le terme polyvalent prend tout son sens dans mon cas, car je suis multi-casquettes. Je suis chargée du bon fonctionnement de la cafétéria, installée au sein même de ce centre de formation, je suis secrétaire à mes heures creuses. Avec plusieurs de mes collègues, nous sommes sur le dispositif FLE (Français Langue Etrangère), un dispositif mis en place pour les élèves nouvellement arrivés qui ne parlent pas ou très peu le français. Nous leur enseignons des cours spécifiques à la place de certains cours traditionnels pour qu’ils soient préparés au mieux à leur examen de fin d’année. J’ai également le plaisir de travailler avec le service d’animation, avec lequel j’organise des campagnes de sensibilisation et d’information sur les violences faites aux femmes.

Aujourd’hui sur les réseaux sociaux, vous êtes très active à la promotion des droits des femmes, qu’est-ce qui vous a poussé à vous battre pour les droits des femmes ?anita

Les inégalités entre les hommes et les femmes, les violences subies par les femmes (Violences conjugales, mutilations génitales féminines, le harcèlement de rue, le mariage forcé, le viol) l’impunité des agresseurs, bref toutes ces raisons m’ont poussée à créer mon association et à me battre pour les droits des femmes. Les femmes sont victimes de tout genre de violences et d’inégalités, et ce dans les quatre coins du monde. Il est donc indispensable de se battre pour nos droits, où que nous soyons. Rien n’est jamais acquis.

  –Ces derniers temps, on a constaté une recrudescence du viol en Guinée, quelles sont vos réactions par rapport à ce fléau?

Je pense que le viol et toutes les autres formes de violences subies par les femmes ont toujours existées en Guinée. Les réseaux sociaux ont tout simplement contribué à la vulgarisation des rares cas que l’on a l’occasion de voir. Il est difficile de lutter dans un pays où même les imams abusent des fillettes, un pays où les lois ne sont pas appliquées, un pays dans lequel les violences faites aux femmes sont complètement banalisées, les droits des femmes souvent bafoués aux noms de la religion et de la tradition. Le gouvernement guinéen doit prendre ses responsabilités face à ces fléaux.
En Guinée tout est tabou, c’est pourquoi il est important d’éduquer, de sensibiliser et d’informer la population.

  – Quel message adressez-vous aux femmes guinéennes pour la lutte des droits des femmes ?

Nous devons être fortes, combatives et déterminées car rien n’est jamais acquis. Simone de Beauvoir disait, « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question », Cette citation me rappelle la sombre journée du 28 septembre 2009 à Conakry. Il est important que chaque femme lutte pour ses droits en Guinée, mais aussi ailleurs. J’invite toutes les femmes guinéennes à se mobiliser davantage pour nos droits.

  –Un mot pour femmesafricaines.info!

J’adore cette autre citation de Simone De Beauvoir « La femme n’est victime d’aucune mystérieuse fatalité : il ne faut pas conclure que ses ovaires la condamnent à vivre éternellement à genoux. » Ce n’est pas parce qu’on est une femme que l’on ne peut rien faire, nous devons nous battre continuellement, il n’y a jamais TROP de personnes pour une lutte, la lutte pour les droits des femmes est une lutte fondamentale.
J’invite vos lecteurs à nous rejoindre sur notre page facebook : https://www.facebook.com/associationchanceetprotectionpourtoutes/?ref=ts&fref=ts&qsefr=1
Merci à femmesafricaines.info pour cette interview.

propos recueillis par
Bolokada Sano
+224657920891

Djenabou Balde